Ă VICTOR HUGO I Dans les plis sinueux des vieilles capitales, OĂč tout, mĂȘme lâhorreur, tourne aux enchantements, Je guette, obĂ©issant Ă mes humeurs fatales, Des ĂȘtres singuliers, dĂ©crĂ©pits et charmants. Ces monstres disloquĂ©s furent jadis des femmes, Ăponine ou LaĂŻs ! Monstres brisĂ©s, bossus Ou tordus, aimons-les ! ce sont encor des Ăąmes. Sous des jupons trouĂ©s et sous de froids tissus Ils rampent, flagellĂ©s par les bises iniques, FrĂ©missant au fracas roulant des omnibus, Et serrant sur leur flanc, ainsi que des reliques, Un petit sac brodĂ© de fleurs ou de rĂ©bus ; Ils trottent, tout pareils Ă des marionnettes ; Se traĂźnent, comme font les animaux blessĂ©s, Ou dansent, sans vouloir danser, pauvres sonnettes OĂč se pend un DĂ©mon sans pitiĂ© ! Tout cassĂ©s Quâils sont, ils ont des yeux perçants comme une vrille, Luisants comme ces trous oĂč lâeau dort dans la nuit ; Ils ont les yeux divins de la petite fille Qui sâĂ©tonne et qui rit Ă tout ce qui reluit. â Avez-vous observĂ© que maints cercueils de vieilles Sont presque aussi petits que celui dâun enfant ? La Mort savante met dans ces biĂšres pareilles Un symbole dâun goĂ»t bizarre et captivant, Et lorsque jâentrevois un fantĂŽme dĂ©bile Traversant de Paris le fourmillant tableau, Il me semble toujours que cet ĂȘtre fragile Sâen va tout doucement vers un nouveau berceau ; Ă moins que, mĂ©ditant sur la gĂ©omĂ©trie, Je ne cherche, Ă lâaspect de ces membres discords, Combien de fois il faut que lâouvrier varie La forme de la boĂźte oĂč lâon met tous ces corps. â Ces yeux sont des puits faits dâun million de larmes, Des creusets quâun mĂ©tal refroidi pailleta⊠Ces yeux mystĂ©rieux ont dâinvincibles charmes Pour celui que lâaustĂšre Infortune allaita ! IIDe Frascati dĂ©funt Vestale enamourĂ©e ; PrĂȘtresse de Thalie, hĂ©las ! dont le souffleur EnterrĂ© sait le nom ; cĂ©lĂšbre Ă©vaporĂ©e Que Tivoli jadis ombragea dans sa fleur, Toutes mâenivrent ! mais parmi ces ĂȘtres frĂȘles Il en est qui, faisant de la douleur un miel, Ont dit au DĂ©vouement qui leur prĂȘtait ses ailes Hippogriffe puissant, mĂšne-moi jusquâau ciel ! Lâune, par sa patrie au malheur exercĂ©e, Lâautre, que son Ă©poux surchargea de douleurs, Lâautre, par son enfant Madone transpercĂ©e, Toutes auraient pu faire un fleuve avec leurs pleurs ! IIIAh ! que jâen ai suivi de ces petites vieilles ! Une, entre autres, Ă lâheure oĂč le soleil tombant Ensanglante le ciel de blessures vermeilles, Pensive, sâasseyait Ă lâĂ©cart sur un banc, Pour entendre un de ces concerts, riches de cuivre, Dont les soldats parfois inondent nos jardins, Et qui, dans ces soirs dâor oĂč lâon se sent revivre, Versent quelque hĂ©roĂŻsme au cĆur des citadins. Celle-lĂ , droite encor, fiĂšre et sentant la rĂšgle, Humait avidement ce chant vif et guerrier ; Son Ćil parfois sâouvrait comme lâĆil dâun vieil aigle ; Son front de marbre avait lâair fait pour le laurier ! IVTelles vous cheminez, stoĂŻques et sans plaintes, Ă travers le chaos des vivantes citĂ©s, MĂšres au cĆur saignant, courtisanes ou saintes, Dont autrefois les noms par tous Ă©taient citĂ©s. Vous qui fĂ»tes la grĂące ou qui fĂ»tes la gloire, Nul ne vous reconnaĂźt ! un ivrogne incivil Vous insulte en passant dâun amour dĂ©risoire ; Sur vos talons gambade un enfant lĂąche et vil. Honteuses dâexister, ombres ratatinĂ©es, Peureuses, le dos bas, vous cĂŽtoyez les murs ; Et nul ne vous salue, Ă©tranges destinĂ©es ! DĂ©bris dâhumanitĂ© pour lâĂ©ternitĂ© mĂ»rs ! Mais moi, moi qui de loin tendrement vous surveille, LâĆil inquiet, fixĂ© sur vos pas incertains, Tout comme si jâĂ©tais votre pĂšre, ĂŽ merveille ! Je goĂ»te Ă votre insu des plaisirs clandestins Je vois sâĂ©panouir vos passions novices ; Sombres ou lumineux, je vis vos jours perdus ; Mon cĆur multipliĂ© jouit de tous vos vices ! Mon Ăąme resplendit de toutes vos vertus ! Ruines ! ma famille ! ĂŽ cerveaux congĂ©nĂšres ! Je vous fais chaque soir un solennel adieu ! OĂč serez-vous demain, Ăves octogĂ©naires, Sur qui pĂšse la griffe effroyable de Dieu ?
Dans le cadre des Diagonales de la Photographie 2012. RĂ©sidence et exposition soutenues par la DRAC RhĂŽne-Alpes Ăcritures de LumiĂšre / MinistĂšre de la Culture et la Ville de Roanne. Yveline Loiseur dĂ©veloppe un travail photographique protĂ©iforme incluant lâinstallation, le papier peint et le livre dâartiste. MĂȘlant lâexpĂ©rience de lâinstantanĂ© avec la mise en scĂšne et la reconstitution en atelier, elle explore les notions de temps, de passage et de mĂ©moire, dessinant une gĂ©ographie sinueuse entre histoire collective, expĂ©rience individuelle et souvenir dâenfance. Depuis la sphĂšre privĂ©e La Vie courante jusque dans le milieu urbain Les Villes invisibles, CrĂ©puscule du matin, Cavalier seul, La Vie matĂ©rielle avec Bureau lâImprimante, chacun de ses projets est conçu Ă partir de micro Ă©vĂ©nements issus du quotidien, accumulĂ©s, rejouĂ©s et recontextualisĂ©s pour entrer en rĂ©sonance avec un environnement social. La photographie devient un territoire dâexpĂ©rimentations poĂ©tiques dans lesquelles le spectateur est amenĂ© Ă se projeter. A Roanne, dans le cadre dâune rĂ©sidence dâartiste Ecriture de LumiĂšres /MinistĂšre de la Culture qui sâest dĂ©roulĂ©e de septembre 2010 Ă avril 2011, elle a menĂ© Ă la fois des ateliers artistiques auprĂšs des scolaires et un travail de crĂ©ation photographique sur la ville. Elle a sillonnĂ© Roanne plusieurs mois avec pour seule contrainte les limites de ce territoire. Elle capte lâordinaire dâune ville, loin des repĂšres habituels, fixant lâintimitĂ© de ses passages, ses Ă©chappĂ©es, ses interstices, ses plis. Elle rassemble, dans une sĂ©dimentation dâimages et dâhistoires, des fragments urbains, des portraits et un papier peint qui, comme une seconde peau de la ville, rejoue dans lâespace dâexposition, les liens qui unissent Roanne au textile. © Yveline Loiseur, Sans Titre 19, 2010, 20Ă29 cm © Yveline Loiseur, Sans Titre 37, 2011, 20Ă29 cm Biographie Yveline Loiseur est nĂ©e en 1965 Ă Cherbourg, elle vit et travaille Ă Lyon. Elle est diplĂŽmĂ©e de lâĂcole Nationale SupĂ©rieure de la Photographie dâArles en 1990 et de lâUniversitĂ© Paris I PanthĂ©on-Sorbonne en 1991. En 2011, elle est laurĂ©ate du programme RĂ©sidences Culturesfrance Hors les Murs Ă Trieste en Italie et en 2010 du Prix de la Quinzaine Photographique Nantaise. Elle bĂ©nĂ©ficie en 2009 dâune Aide Individuelle Ă la CrĂ©ation allouĂ©e par la Drac RhĂŽne Alpes â MinistĂšre de la Culture pour son projet Sylvie et Bruno autour du texte de Lewis Carroll. Son travail fait partie de nombreuses collections publiques et privĂ©es et est rĂ©guliĂšrement montrĂ© en France et Ă lâĂ©tranger, en 2011 Ă la MĂ©diathĂšque de Roanne et au Luxembourg, en 2010 Ă Bratislava et Ă Nantes, en 2009 Ă MontrĂ©al et Ă Marseille, en 2008 Ă lâInstitut français de Dresde, en 2006 au MusĂ©e dâart contemporain de Lyon.
Lune, par sa patrie au malheur exercĂ©e, L'autre, que son Ă©poux surchargea de douleurs, L'autre, par son enfant Madone transpercĂ©e, Toutes auraient pu faire un fleuve avec leurs pleurs ! III. Ah ! que j'en ai suivi de ces petites vieilles ! Une, entre autres, Ă l'heure oĂč le soleil tombant.
A Victor Hugo I Dans les plis sinueux des vieilles capitales, OĂč tout, mĂȘme l'horreur, tourne aux enchantements, Je guette, obĂ©issant Ă mes humeurs fatales Des ĂȘtres singuliers, dĂ©crĂ©pits et charmants. Ces monstres disloquĂ©s furent jadis des femmes, Ăponine ou LaĂŻs ! Monstres brisĂ©s, bossus Ou tordus, aimons-les ! ce sont encor des Ăąmes. Sous des jupons trouĂ©s et sous de froids tissus Ils rampent, flagellĂ©s par les bises iniques, FrĂ©missant au fracas roulant des omnibus, Et serrant sur leur flanc, ainsi que des reliques, Un petit sac brodĂ© de fleurs ou de rĂ©bus ; Ils trottent, tout pareils Ă des marionnettes ; Se traĂźnent, comme font les animaux blessĂ©s, Ou dansent, sans vouloir danser, pauvres sonnettes OĂč se pend un DĂ©mon sans pitiĂ© ! Tout cassĂ©s Qu'ils sont, ils ont des yeux perçants comme une vrille, Luisants comme ces trous oĂč l'eau dort dans la nuit ; Ils ont les yeux divins de la petite fille Qui s'Ă©tonne et qui rit Ă tout ce qui reluit. - Avez-vous observĂ© que maints cercueils de vieilles Sont presque aussi petits que celui d'un enfant ? La Mort savante met dans ces biĂšres pareilles Un symbole d'un goĂ»t bizarre et captivant, Et lorsque j'entrevois un fantĂŽme dĂ©bile Traversant de Paris le fourmillant tableau, Il me semble toujours que cet ĂȘtre fragile S'en va tout doucement vers un nouveau berceau ; A moins que, mĂ©ditant sur la gĂ©omĂ©trie, Je ne cherche, Ă l'aspect de ces membres discords, Combien de fois il faut que l'ouvrier varie La forme de la boĂźte oĂč l'on met tous ces corps. - Ces yeux sont des puits faits d'un million de larmes, Des creusets qu'un mĂ©tal refroidi pailleta... Ces yeux mystĂ©rieux ont d'invincibles charmes Pour celui que l'austĂšre Infortune allaita ! II De Frascati dĂ©funt Vestale enamourĂ©e ; PrĂȘtresse de Thalie, hĂ©las ! dont le souffleur EnterrĂ© sait le nom ; cĂ©lĂšbre Ă©vaporĂ©e Que Tivoli jadis ombragea dans sa fleur, Toutes m'enivrent ; mais parmi ces ĂȘtres frĂȘles Il en est qui, faisant de la douleur un miel Ont dit au DĂ©vouement qui leur prĂȘtait ses ailes Hippogriffe puissant, mĂšne-moi jusqu'au ciel ! L'une, par sa patrie au malheur exercĂ©e, L'autre, que son Ă©poux surchargea de douleurs, L'autre, par son enfant Madone transpercĂ©e, Toutes auraient pu faire un fleuve avec leurs pleurs ! III Ah ! que j'en ai suivi de ces petites vieilles ! Une, entre autres, Ă l'heure oĂč le soleil tombant Ensanglante le ciel de blessures vermeilles, Pensive, s'asseyait Ă l'Ă©cart sur un banc, Pour entendre un de ces concerts, riches de cuivre, Dont les soldats parfois inondent nos jardins, Et qui, dans ces soirs d'or oĂč l'on se sent revivre, Versent quelque hĂ©roĂŻsme au coeur des citadins. Celle-lĂ , droite encor, fiĂšre et sentant la rĂšgle, Humait avidement ce chant vif et guerrier ; Son oeil parfois s'ouvrait comme l'oeil d'un vieil aigle ; Son front de marbre avait l'air fait pour le laurier ! IV Telles vous cheminez, stoĂŻques et sans plaintes, A travers le chaos des vivantes citĂ©s, MĂšres au coeur saignant, courtisanes ou saintes, Dont autrefois les noms par tous Ă©taient citĂ©s. Vous qui fĂ»tes la grĂące ou qui fĂ»tes la gloire, Nul ne vous reconnaĂźt ! un ivrogne incivil Vous insulte en passant d'un amour dĂ©risoire ; Sur vos talons gambade un enfant lĂąche et vil. Honteuses d'exister, ombres ratatinĂ©es, Peureuses, le dos bas, vous cĂŽtoyez les murs ; Et nul ne vous salue, Ă©tranges destinĂ©es ! DĂ©bris d'humanitĂ© pour l'Ă©ternitĂ© mĂ»rs ! Mais moi, moi qui de loin tendrement vous surveille, L'oeil inquiet, fixĂ© sur vos pas incertains, Tout comme si j'Ă©tais votre pĂšre, ĂŽ merveille ! Je goĂ»te Ă votre insu des plaisirs clandestins Je vois s'Ă©panouir vos passions novices ; Sombres ou lumineux, je vis vos jours perdus ; Mon coeur multipliĂ© jouit de tous vos vices ! Mon Ăąme resplendit de toutes vos vertus ! Ruines ! ma famille ! ĂŽ cerveaux congĂ©nĂšres ! Je vous fais chaque soir un solennel adieu ! OĂč serez-vous demain, Ăves octogĂ©naires, Sur qui pĂšse la griffe effroyable de Dieu ?
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Titre Dans les plis sinueux des vieilles capitalesAuteur Sylvie TaussigEdition Galaade 2012Nombre de pages 680Isbn 13 9782351761717Dans une rue de Paris, non loin de l'appartement de Claude-HĂ©lĂšne et de TĂ©rence, un couple d'apparence ordinaire, des travaux de rĂ©novation mettent au jour un mur aveugle et noir. Claude- HĂ©lĂšne le connaĂźt par coeur c'est elle qui l'a conçu, il y a quinze ans, quand elle a inventĂ© le concept de micro-intervention urbaine. Elle avait voulu se faire artiste pour regagner l'amour de MikhaĂŻl, son Russe, qui voulait la quitter. Mais MikhaĂŻl Ă©tait parti quand mĂȘme, le projet avait Ă©tĂ© refusĂ©, puis le mur Ă©tait tombĂ© dans l'oubli. Depuis, elle a changĂ© de vie, et d'amour. Alors pourquoi refait-il surface maintenant, son mur des lamentations ? Ailleurs dans la ville, une sĂ©rie de dĂ©lits artistiques semble avoir fleuri, comme une Ă©trange Ă©pidĂ©mie. Des carrĂ©s de mosaĂŻques se multiplient un pou dans le mur d'un cafĂ©, une cerise tout en haut du SacrĂ©-Coeur. BientĂŽt, la police mĂšne l'enquĂȘte est-ce de l'art ou du vandalisme ? un geste politique, Ă l'heure oĂč la mairie de Paris bascule dans l'opposition ? Autres livres du mĂȘme auteur
Dans les plis sinueux des vieilles capitales, comme une anatomie et une gĂ©ographie imaginaires. Au tournant du XXIe siĂšcle, lâart contemporain contamine Paris. 1700 pages curieusement fluides, agrĂ©ables Ă lire, en partie centrĂ©es sur Claude-HĂ©lĂšne, une femme de 40 ans qui Magistrale comĂ©die de mĆurs Ă lâĂ©chelle dâune ville, ce roman de Sylvie Taussig
Ă Victor Hugo I Dans les plis sinueux des vieilles capitales, OĂč tout, mĂȘme l'horreur, tourne aux enchantements, Je guette, obĂ©issant Ă mes humeurs fatales, Des ĂȘtres singuliers, dĂ©crĂ©pits et charmants. Ces monstres disloquĂ©s furent jadis des femmes, Ăponyme ou LaĂŻs ! Monstres brisĂ©s, bossus Ou tordus, aimons-les ! Ce sont encor des Ăąmes. Sous des jupons trouĂ©s et sous de froids tissus Ils rampent, flagellĂ©s par les bises iniques, FrĂ©missant au fracas roulant des omnibus, Et serrant sur leur flanc, ainsi que des reliques, Un petit sac brodĂ© de fleurs ou de rĂ©bus ; Ils trottent, tout pareils Ă des marionnettes ; Se traĂźnent, comme font les animaux blessĂ©s, Ou dansent, sans vouloir danser, pauvres sonnettes OĂč se pend un DĂ©mon sans pitiĂ© ! Tout cassĂ©s Qu'ils sont, ils ont des yeux perçants comme une vrille, Luisants comme ces trous oĂč l'eau dort dans la nuit ; Ils ont les yeux divins de la petite fille Qui s'Ă©tonne et qui rit Ă tout ce qui reluit. - Avez-vous observĂ© que maints cercueils de vieilles Sont presque aussi petits que celui d'un enfant ? La mort savante met dans ces biĂšres pareilles Un symbole d'un goĂ»t bizarre et captivant, Et lorsque j'entrevois un fantĂŽme dĂ©bile Traversant de Paris le fourmillant tableau, Il me semble toujours que cet ĂȘtre fragile S'en va tout doucement vers un nouveau berceau ; Ă moins que, mĂ©ditant sur la gĂ©omĂ©trie, Je ne cherche, Ă l'aspect de ces membres discords, Combien de fois il faut que l'ouvrier varie La forme d'une boĂźte oĂč l'on met tous ces corps. - Ces yeux sont des puits faits d'un million de larmes, Des creusets qu'un mĂ©tal refroidi pailleta... Ces yeux mystĂ©rieux ont d'invincibles charmes Pour celui que l'austĂšre Infortune allaita ! II De Frascati dĂ©funt Vestale enamourĂ©e ; PrĂȘtresse de Thalie, hĂ©las ! Dont le souffleur EnterrĂ© sait le nom ; cĂ©lĂšbre Ă©vaporĂ©e Que Tivoli jadis ombragea dans sa fleur, Toutes m'enivrent ! Mais parmi ces ĂȘtres frĂȘles Il en est qui, faisant de la douleur un miel, Ont dit au DĂ©vouement qui leur prĂȘtait ses ailes Hippogriffe puissant, mĂšne-moi jusqu'au ciel ! L'une, par sa patrie au malheur exercĂ©e, L'autre, que son Ă©poux surchargea de douleurs, L'autre, par son enfant Madone transpercĂ©e, Toutes auraient pu faire un fleuve avec leurs pleurs ! III Ah ! Que j'en ai suivi de ces petites vieilles ! Une, entre autres, Ă l'heure oĂč le soleil tombant Ensanglante le ciel de blessures vermeilles, Pensive, s'asseyait Ă l'Ă©cart sur un banc, Pour entendre un de ces concerts, riches de cuivre, Dont les soldats parfois inondent nos jardins, Et qui, dans ces soirs d'or oĂč l'on se sent revivre, Versent quelque hĂ©roĂŻsme au cĆur des citadins. Celle-lĂ , droite encor, fiĂšre et sentant la rĂšgle, Humait avidement ce chant vif et guerrier ; Son Ćil parfois s'ouvrait comme Ćil d'un vieil aigle ; Son front de marbre avait l'air fait pour le laurier ! IV Telles vous cheminez, stoĂŻques et sans plaintes, Ă travers le chaos des vivantes citĂ©s, MĂšres au cĆur saignant, courtisanes ou saintes, Dont autrefois les noms par tous Ă©taient citĂ©s. Vous qui fĂ»tes la grĂące ou qui fĂ»tes la gloire, Nul ne vous reconnaĂźt ! Un ivrogne incivil Vous insulte en passant d'un amour dĂ©risoire ; Sur vos talons gambade un enfant lĂąche et vil. Honteuses d'exister, ombres ratatinĂ©es, Peureuses, le dos bas, vous cĂŽtoyez les murs ; Et nul ne vous salue, Ă©tranges destinĂ©es ! DĂ©bris d'humanitĂ© pour l'Ă©ternitĂ© mĂ»rs ! Mais moi, moi qui de loin tendrement vous surveille, Ćil inquiet, fixĂ© sur vos pas incertains, Tout comme si j'Ă©tais votre pĂšre, ĂŽ merveille ! Je goĂ»te Ă votre insu des plaisirs clandestins Je vois s'Ă©panouir vos passions novices ; Sombres ou lumineux, je vis vos jours perdus ; Mon cĆur multipliĂ© jouit de tous vos vices ! Mon Ăąme resplendit de toutes vos vertus ! Ruines ! Ma famille ! Ă cerveaux congĂ©nĂšres ! Je vous fais chaque soir un solennel adieu ! OĂč serez-vous demain, Ăves octogĂ©naires, Sur qui pĂšse la griffe effroyable de Dieu ? CdiscountLibrairie - DĂ©couvrez notre offre Dans les plis sinueux des vieilles capitales. Livraison gratuite Ă partir de 25âŹ* | Paiement sĂ©curisĂ© | 4x possible | Retour simple et rapide Votre navigateur internet nâest plus supportĂ© par notre site. Afin de bĂ©nĂ©ficier dâune navigation optimale, merci de mettre Ă jour votre navigateur.Mediapartest un journal d'information en ligne participatif, indĂ©pendant, sans publicitĂ© ni subvention et qui ne vit que des abonnements de ses lecteurs.
Hommage Ă Dominique Rolin, Le N° 145 de lâInfini, Automne 2019, rassemble sous le titre Dominique Rolin, La vie est une offrande » de prĂ©cieux textes de lâĂ©crivaine, disparue en 2012. Parmi ceux-ci, la version intĂ©grale des Petites vieilles » de Charles Baudelaire, un poĂšme qui la relie Ă sa mĂšre, Ă son enfance. D. R. nous dit ce quâil reprĂ©sentait pour elle. Ce poĂšme fait partie des Tableaux parisiens, des Fleurs du mal. Il a Ă©tĂ© mis en musique par Georges Chelon, en 2009. Texte de Charles Baudelaire Les Fleurs du mal mis en musique par Georges Chelon, CD intĂ©gral 2009 XCI. - LES PETITES VIEILLES » A Victor Hugo Charles Baudelaire I Dans les plis sinueux des vieilles capitales, OĂč tout, mĂȘme lâhorreur, tourne aux enchantements, Je guette, obĂ©issant Ă mes humeurs fatales, Des ĂȘtres singuliers, dĂ©crĂ©pits et charmants. Ces monstres disloquĂ©s furent jadis des femmes, Ăponine ou LaĂŻs ! Monstres brisĂ©s, bossus Ou tordus, aimons-les ! ce sont encor des Ăąmes. Sous des jupons trouĂ©s et sous de froids tissus Ils rampent, flagellĂ©s par des bises iniques, FrĂ©missant au fracas roulant des omnibus, Et serrant sur leur flanc, ainsi que des reliques, Un petit sac brodĂ© de fleurs ou de rĂ©bus ; Ils trottent, tout pareils Ă des marionnettes ; Se traĂźnent, comme font les animaux blessĂ©s, Ou dansent, sans vouloir danser, pauvres sonnettes OĂč se pend un DĂ©mon sans pitiĂ© ! Tout cassĂ©s Quâils sont, ils ont des yeux perçants comme une vrille, Luisants comme ces trous oĂč lâeau dort dans la nuit ; Ils ont les yeux divins de la petite fille Qui sâĂ©tonne et qui rit Ă tout ce qui reluit. - Avez-vous observĂ© que maints cercueils de vieilles Sont presque aussi petits que celui dâun enfant ? La Mort savante met dans ces biĂšres pareilles Un symbole dâun goĂ»t bizarre et captivant, Et lorsque jâentrevois un fantĂŽme dĂ©bile Traversant de Paris le fourmillant tableau, Il me semble toujours que cet ĂȘtre fragile Sâen va tout doucement vers un nouveau berceau ; Ă moins que, mĂ©ditant sur la gĂ©omĂ©trie, Je ne cherche, Ă lâaspect de ces membres discords, Combien de fois il faut que lâouvrier varie La forme de la boĂźte oĂč lâon met tous ces corps. - Ces yeux sont des puits faits dâun million de larmes, Des creusets quâun mĂ©tal refroidi pailleta... Ces yeux mystĂ©rieux ont dâinvincibles charmes Pour celui que lâaustĂšre Infortune allaita ! II De Frascati dĂ©funt Vestale enamourĂ©e ; PrĂȘtresse de Thalie, hĂ©las ! dont le souffleur EnterrĂ© sait le nom ; cĂ©lĂšbre Ă©vaporĂ©e Que Tivoli jadis ombragea dans sa fleur, Toutes mâenivrent ; mais parmi ces ĂȘtres frĂȘles Il en est qui, faisant de la douleur un miel, Ont dit au DĂ©vouement qui leur prĂȘtait ses ailes Hippogriffe puissant, mĂšne-moi jusquâau ciel ! Lâune, par sa patrie au malheur exercĂ©e, Lâautre, que son Ă©poux surchargea de douleurs, Lâautre, par son enfant Madone transpercĂ©e, Toutes auraient pu faire un fleuve avec leurs pleurs ! III Ah ! que jâen ai suivi de ces petites vieilles ! Une, entre autres, Ă lâheure oĂč le soleil tombant Ensanglante le ciel de blessures vermeilles, Pensive, sâasseyait Ă lâĂ©cart sur un banc, Pour entendre un de ces concerts, riches de cuivre, Dont les soldats parfois inondent nos jardins, Et qui, dans ces soirs dâor oĂč lâon se sent revivre, Versent quelque hĂ©roĂŻsme au cĆur des citadins. Celle-lĂ , droite encor, fiĂšre et sentant la rĂšgle, Humait avidement ce chant vif et guerrier ; Son Ćil parfois sâouvrait comme lâĆil dâun vieil aigle ; Son front de marbre avait lâair fait pour le laurier ! IV Telles vous cheminez, stoĂŻques et sans plaintes, A travers le chaos des vivantes citĂ©s, MĂšres au cĆur saignant, courtisanes ou saintes, Dont autrefois les noms par tous Ă©taient citĂ©s. Vous qui fĂ»tes la grĂące ou qui fĂ»tes la gloire, Nul ne vous reconnaĂźt ! un ivrogne incivil Vous insulte en passant dâun amour dĂ©risoire ; Sur vos talons gambade un enfant lĂąche et vil. Honteuses dâexister, ombres ratatinĂ©es, Peureuses, le dos bas, vous cĂŽtoyez les murs ; Et nul ne vous salue, Ă©tranges destinĂ©es ! DĂ©bris dâhumanitĂ© pour lâĂ©ternitĂ© mĂ»rs ! Mais moi, moi qui de loin tendrement vous surveille, LâĆil inquiet, fixĂ© sur vos pas incertains, Tout comme si jâĂ©tais votre pĂšre, ĂŽ merveille ! Je goĂ»te Ă votre insu des plaisirs clandestins Je vois sâĂ©panouir vos passions novices ; Sombres ou lumineux, je vis vos jours perdus ; Mon cĆur multipliĂ© jouit de tous vos vices ! Mon Ăąme resplendit de toutes vos vertus ! Ruine ! ma famille ! ĂŽ cerveaux congĂ©nĂšres ! Je vous fais chaque soir un solennel adieu ! OĂč serez-vous demain, Ăves octogĂ©naires, Sur qui pĂšse la griffe effroyable de Dieu ? * Ma mĂšre, qui Ă©tait professeur de diction, nous faisait rĂ©citer par cĆur toutes sortes de poĂ©sies, donr les petites vieilles » de Charles Baudelaire. Jâai su ce poĂšme Ă 12 ans. Ă 18 ans, je lâai Ă©tudiĂ© Ă fond et il ne mâa jamais quittĂ©e. RĂ©cemment, tout dâun coup, aprĂšs une nuit sombre, il mâest revenu intĂ©gralement, dans cet intervalle si particulier entre le rĂȘve et le rĂ©veil. Jâai pu le murmurer pour moi seule jusquâau bout, comme il mâĂ©tait arrivĂ© de le faire trĂšs souvent auparavant. Câest tout de mĂȘme trĂšs curieux que ces petites vieilles » aient pu impressionner Ă ce point lâenfant que jâĂ©tais. Mais câest un fait ce poĂšme mâa laissĂ© des marques violentes et inscrites Ă vif dans ma mĂ©moire pour toujours. Le cĂŽtĂ© tragique de lâexistence ne mâa pourtant jamais impressionnĂ©e, ni la vieil-lesse ni la mort qui rĂ©duit lâĂȘtre humain Ă une poignĂ©e de rĂ©sidus quâon enfouit dans la terre comme si cet acte pouvait faire disparaĂźtre lâĂąme des choses de la vie... Je mây refuse absolument, car cela sonne faux. Je suis sauvĂ©e par les poĂšmes ! Ils sont chargĂ©s de cette forme dâexistence sans chair, mais riches dâune soliditĂ© et dâune possibilitĂ© dâaction sur le rĂ©el sans commune mesure avec le tout-venant de lâexistence. Un poĂšme, câest dâabord une musique qui sâinvite sur la terre, dans la voix de ma mĂšre, sur ma peau alors toute juvĂ©nile. Au moment de penser Ă la rĂ©alisation de ce livre [1] il est venu sâimposer Ă moi avec une force et une vĂ©ritĂ© impossibles Ă repousser. Il fait partie de mon Ăąme et de mon corps. En vous le lisant Ă haute voix, je sais quâil sâintĂšgre aussi Ă votre Ăąme et Ă votre corps. Il circule entre nous... Vous qui avez la plume Ă la main et que je regarde avec affection, moi qui suis dans lâobligation de rendre compte de ma mĂ©moire rythmĂ©e par ce poĂšme cruel, terrible et tellement beau. Vous prenez des notes sur ce que je viens de dire, et ce livre que nous construisons ensemble sort comme sâil Ă©manait Ă la fois de votre peau Ă©clairĂ©e par le soleil qui entre dans la piĂšce et de votre dĂ©sir dâen faire un bloc original, autant que de ma volontĂ© tendue vers la rĂ©ussite dâun objet fidĂšle Ă ce que je suis. Ce sont nos atouts premiers ! Ce poĂšme est splendide dans la violence mĂȘme de son rythme, et il faut sâen servir Ă la maniĂšre dâune succession de coups de poing sur la table gui rendraient possible la recrĂ©ation de cette Ă©criture aujourdâhui. Je rĂȘve Ă nouveau beaucoup, mais dâune maniĂšre plus diluĂ©e quâauparavant... Certains de mes rĂȘves sont horribles. Je perds ma maison, je nâai plus personne autour de moi, je marche sans savoir oĂč je vais dormir. Câest triste, difficile Ă supÂŹporter... Au moment oĂč je sortais de ma nuit, pourquoi ce poĂšme-lĂ parmi tous les autres a-t-il surgi avec une prĂ©cision telle que tout est devenu plus rassurant autour de moi ? Je crois quâil mâincite Ă me rapprocher de ce cĂŽtĂ© de la vie que chacun essaie de taire en soi ou dâenfouir dans le rythme de la journĂ©e oĂč lâon se sent incapable de lâaffronter. A VICTOR HUGO Il nâest pas anodin que Les Petites Vieilles », un des quelques poĂšmes dĂ©dicacĂ©s des Fleurs du Mal, soit adressĂ© Ă Victor Hugo. Ce nâest pas ici au proscrit illustre que Baudelaire rend hommage comme dans Le Cygne », mais bien plutĂŽt au dĂ©fenseur des humbles et des marginaux, qui nâa cessĂ© de proclamer lâuniversel droit dâĂȘtre aimĂ©. Baudelaire ne cache pas que câest cette charitĂ© hugolienne qui imprĂšgne son poĂšme le texte, Ă©crit-il Ă Hugo en 1859, a Ă©tĂ© fait en vue de vous imiter riez de ma fatuitĂ©, jâen ris moi-mĂȘme, aprĂšs avoir relu quelques piĂšces de vos recueils, oĂč une charitĂ© si magnifique se mĂȘle Ă une familiaritĂ© si touchante ». Les petites vieilles » on reviendra sur cet adjectif ont la grandeur des petits que Hugo a cĂ©lĂ©brĂ©e dans ses poĂšmes, en accord avec le titre du plus long poĂšme des Contemplations Magnitudo Parvi ». Les figures de vieillards sont du reste lĂ©gion dans lâĆuvre de Hugo, le grotesque thĂ©orisĂ© par Hugo a sa place dans bien des vers des Petites Vieilles » et, enfin, les mĂ©ditations de Baudelaire sur la proximitĂ© du cercueil et du berceau ont une certaine rĂ©sonance hugolienne â Hugo nâĂ©crit-il pas dans la prĂ©face des Contemplations quâil peint lâexistence humaine sortant de lâĂ©nigme du berceau et aboutissant Ă lâĂ©nigme du cercueil » ? Mais lâadmiration de Baudelaire pour Hugo est loin dâĂȘtre sans rĂ©serves, et quelque imprĂ©gnĂ© quâil soit dâaccents hugoliens, Les Petites Vieilles » reste un poĂšme profondĂ©ment baudelairien. Paris est la capitale infĂąme » effrayante et captivante que ne cesse de chanter Baudelaire ; le sarcasme se mĂȘle au pathos, sans nĂ©anmoins lâannuler ; la transfiguration des petites vieilles rĂ©pond au projet de faire fleurir » le mal. Sâil y a identification avec les petites vieilles », ce nâest pas seulement au nom de la sympathie pour les humbles, câest parce que ces silhouettes tordues et rampantes sont lâimage de ce dĂ©classĂ© dĂ©risoire, de cet ĂȘtre informe et dĂ©chu â bien Ă©loignĂ© du mage hugolien â quâest le poĂšte. Nous Ă©tudierons la premiĂšre des quatre sections du poĂšme, oĂč le portrait des petites vieilles sâĂ©bauche essentiellement Ă partir de deux Ă©lĂ©ments Ă valeur emblĂ©matique leur dĂ©marche et leur regard. Le poĂšte insiste sur la trouble fascination que les femmes disgraciĂ©es exercent sur lui v. 1-7, dĂ©crit lâallure dĂ©sarticulĂ©e de ces pauvres ĂȘtres cheminant dans la ville v. 8-16 et enfin puise dans leur regard les liens quâelles entretiennent avec le monde de lâenfance v. 16-36. Les petites vieilles » le titre, malgrĂ© sa simplicitĂ©, mĂ©rite lâattention. [âŠ] Au-delĂ de sa valeur hypocoristique, lâadjectif petite prend un sens profond dans Les Petites Vieilles » dâabord parce que ces fantĂŽmes fĂ©minins font partie des Petits » cĂ©lĂ©brĂ©s par Hugo une section de la LĂ©gende des SiĂšcles sâappellera Les Petits », ensuite parce que la petitesse de ces femmes ratatinĂ©es fait lâobjet de certaines des plus belles strophes du poĂšme, avec la comparaison de la petite vieille » Ă une petite fille », et la mĂ©ditation sur les minuscules cercueils qui seront bĂątis pour ces ĂȘtres fragiles ». Nicolas FrĂ©ry extrait Je suis trĂšs ĂągĂ©e, je nâai plus tellement de temps Ă vivre. Or, jâaime la vie et je continue Ă lâaimer malgrĂ© le travail de la mort qui est un calvaire. Je perds mon indĂ©pendance physique et je dois mâadapter aux difficultĂ©s de la dĂ©pendance qui affectent ma maniĂšre de mouvoir bras et jambes. Mais le mystĂšre, ce nâest pas la mort, câest la vie qui ne se laisse pas approcher de lâĂȘtre si facilement, mĂȘme si lâon arrive comme moi Ă ce moment oĂč tout va sâarrĂȘter. Jusquâau bout reste ce besoin dâavoir un corps vivant qui vous double jour et nuit pour vous garder intact. Ce poĂšme est magnifique, parce quâon a lâimpression que Baudelaire porte en lui des messages secrets quâil transmet dans son Ćuvre Ă travers ces vers tordus, mĂ©chants, violents... Il y a en effet, surplombant tout, une vitalitĂ© et une foi dans la beautĂ© qui existe en parallĂšle Ă la brutalitĂ© du spectacle de ces petites vieilles » abandonnĂ©es dans la ville. Baudelaire nous prĂ©vient contre le dĂ©sespoir. Jâestime que quand nous parlons, nous employons des mots beaux, articulĂ©s, significatifs, qui sont Ă la disposition de tout ĂȘtre humain, mais qui nâont peut-ĂȘtre jamais Ă©tĂ© employĂ©s comme ils le sont en ce moment, alors que le ciel bleuit et que le soleil entre en grand dans mon intĂ©rieur... Câest un poĂšme en soi. Lorsque jâai dĂ» trouver un endroit oĂč vivre Ă Paris en 1959, jâavais dit Ă lâagent immobilier, jâexige un appartement qui soit au soleil ». Il mâavait alors rĂ©pondu avec une Ă©pouvantable voix de vendeur de soupe, ah, mais vous savez, le soleil est une denrĂ©e rare ! », comme sâil sâagissait dâun luxe absolu. Je suis trĂšs sensible aux voix, elles disent tout. Ma mĂšre avait une trĂšs jolie voix. Elle avait connu Sarah Bernhardt, dont la voix nous paraĂźt aujourdâhui trĂšs datĂ©e, et elle gardait des souvenirs trĂšs prĂ©cis de cette intrusion heureuse par le gĂ©nie de la voix, ce gĂ©nie de la comprĂ©hension cachĂ©e dâun poĂšme, parce quâon ne sait pas toujours ce quâon lit quand on lit. Baudelaire est un trĂšs grand poĂšte qui vit dans son Ă©poque, avec ses joies et ses horreurs. Il voit tout, il sent tout. Quand je le redĂ©couvre Ă voix haute, je retrouve mes sensations intactes et violentes, et câest dĂ©chirant. Au moment des obsĂšques de Jean-Paul II, je me souviens avoir regardĂ© la cĂ©rĂ©-monie Ă la tĂ©lĂ©vision et en avoir Ă©tĂ© trĂšs Ă©mue, en Ă©prouvant aussi cette sensation de dĂ©chirement. Il faisait plein soleil, pas de vent ni de menaces. Toue Ă©tait libĂ©rĂ© pour le spectacle, avec toute la pompe du Vatican, et posĂ© Ă mĂȘme le sol, ce cercueil en bois tout simple, au centre. Il y avait un ocĂ©an de visages serrĂ©s les uns contre les autres, des drapeaux, tous ces habits ecclĂ©siastiques chatoyants dans la lumiĂšre, et la beautĂ© surhumaine contenue dans lâĂąme, le cĆur et le corps de celui qui repoÂŹsait lĂ , comme un pauvre. Je me suis sentie brisĂ©e et reconstruite autrement, dans un sens de moi-mĂȘme que je nâavais jamais espĂ©rĂ©. Tout mâĂ©tait donnĂ© et tout Ă©tait recouvert ce jour-lĂ par la prĂ©sence charnelle de la foi. CâĂ©tait la chair de la tendresse pour le Christ, une admiration et une concentration infinies. Au milieu des photographes circulant en grappe, la prĂ©sence de ce vieux pape arrĂȘtĂ©e sur une image splendide comme dans un tableau. Chaque ĂȘtre humain est une direction. Ce que je regardais constituait pour moi seule un acquis que je volais Ă ma propre mort et un ensemble inaltĂ©rable et joyeux. Tout Ă©tait Ă prendre. Il sâagissait dâune fĂȘte, non seulement religieuse, mais aussi mentale, morale et esthĂ©tique. Comme pour un printemps nouveau. Jâai pour mâaccompagner, en poĂ©sie et dans la vie telle que je la rĂȘve, tout un monde fulminant dâimpressions parfois contradictoires... Contre la griffe effroyable de Dieu » de la fin du poĂšme de Baudelaire, la foi en lâamour bagarreur du poĂšte qui Ă©loigne la mort. oOo
Dansles plis sinueux des vieilles capitales. Galaade. François Tison. Farcissures. Allia. Elie Tresse. Ni ce quâils espĂšrent, ni ce quâils croient. Allia Retrouvez tous ces livres dans notre rubrique ActualitĂ© & coups de coeur. La table avant l'arrivĂ©e des invitĂ©s. Le salon de thĂ© de La Dame au Chapeau. DĂ©couverte du lieu de notre cafĂ© littĂ©raire itinĂ©rant. Une vue de lNous avons produit lâanalyse du poĂšme Les Petites Vieilles de Baudelaire dans le cadre de lâĂ©tude du thĂšme de culture gĂ©nĂ©rale du concours de prĂ©pas Ă©conomiques et commerciales en 2018 qui Ă©tait le corps. NĂ©anmoins, cette analyse approfondie peut servir lâensemble des Ă©tudiants. Les petites vieilles de Baudelaire extrait choisi I Dans les plis sinueux des vieilles capitales, OĂč tout, mĂȘme lâhorreur, tourne aux enchantements, Je guette, obĂ©issant Ă mes humeurs fatales Des ĂȘtres singuliers, dĂ©crĂ©pits et charmants. Ces monstres disloquĂ©s furent jadis des femmes, Ăponine ou LaĂŻs ! Monstres brisĂ©s, bossus Ou tordus, aimons-les ! ce sont encor des Ăąmes. Sous des jupons trouĂ©s et sous de froids tissus Ils rampent, flagellĂ©s par les bises iniques, FrĂ©missant au fracas roulant des omnibus, Et serrant sur leur flanc, ainsi que des reliques, Un petit sac brodĂ© de fleurs ou de rĂ©bus ; Ils trottent, tout pareils Ă des marionnettes ; Se traĂźnent, comme font les animaux blessĂ©s, Ou dansent, sans vouloir danser, pauvres sonnettes OĂč se pend un DĂ©mon sans pitiĂ© ! Tout cassĂ©s Quâils sont, ils ont des yeux perçants comme une vrille, Luisants comme ces trous oĂč lâeau dort dans la nuit ; Ils ont les yeux divins de la petite fille Qui sâĂ©tonne et qui rit Ă tout ce qui reluit. â Avez-vous observĂ© que maints cercueils de vieilles Sont presque aussi petits que celui dâun enfant ? La Mort savante met dans ces biĂšres pareilles Un symbole dâun goĂ»t bizarre et captivant, Et lorsque jâentrevois un fantĂŽme dĂ©bile Traversant de Paris le fourmillant tableau, Il me semble toujours que cet ĂȘtre fragile Sâen va tout doucement vers un nouveau berceau ; A moins que, mĂ©ditant sur la gĂ©omĂ©trie, Je ne cherche, Ă lâaspect de ces membres discords, Combien de fois il faut que lâouvrier varie La forme de la boĂźte oĂč lâon met tous ces corps. Introduction de lâanalyse Dans lâesthĂ©tique de la laideur, on peut dire que Baudelaire est un prĂ©curseur. Aussi, en ce qui concerne la description de la vieillesse, il se distingue nettement de Ronsard voir lâarticle sur Quand vous serez bien vieille », qui ne perçoit aucune beautĂ© dans les traits dâune vieille femme. Baudelaire offre un portrait assez pitoyable de la vieillesse, tout en mĂȘlant un sentiment de tendresse envers celle-ci. Comment Baudelaire fait-il du corps considĂ©rĂ© comme laid, â le corps des vieilles femmes â un objet de beautĂ© ? Alors que Ronsard prĂ©vient HĂ©lĂšne quâaucune vieille femme nâest la Muse des poĂštes, Baudelaire, lui, dĂ©die un poĂšme Ă ces crĂ©atures quâil trouve mystĂ©rieuses. Il prouve Ă nouveau la modernitĂ© de son esthĂ©tisme, et sa rupture avec les codes classique de la poĂ©sie les thĂšmes quâil aborde est Ă lâopposĂ© de la tradition. Ainsi, tout en respectant les rĂšgles poĂ©tiques formelles, Baudelaire choisit de renverser les codes et, littĂ©ralement, de crĂ©er du neuf avec du vieux. Des petites vieilles monstrueuses Au premier abord, le rapport quâentretient le poĂšte avec les petites vieilles » est ambigu il les compare Ă des monstres mais invite dans le mĂȘme temps Ă les aimer. On peut alors se dire quâil voit des aspects dâelles que les autres ne voient pas elles sont humaines, elles furent jeunes et belles un jour. Il distingue leur humanitĂ© au-delĂ de leur physique dĂ©fraĂźchi. Des femmes ? Les personnages mis en scĂšne dans le poĂšme sont des petites vieilles », comme si elles nâavaient jamais Ă©tĂ© caractĂ©risĂ©es que par leur Ăąge avancĂ©. De fait, elles furent jadis des femmes » ce qui laisse Ă penser quâelles ne disposent plus, effectivement, de leur humanitĂ©. Elles se sont transformĂ©es en crĂ©atures laides que personne ne saurait prĂ©cisĂ©ment identifier, et caractĂ©risĂ©es par leurs dĂ©formations. Elles sont devenues des vestiges dâun autre temps, des reliques » A tel point quâelles sont terriblement affaiblies, puisque plus aucune force vitale ne les rĂ©git. Les petites vielles deviennent presque irrĂ©elles, de simples silhouettes ou fantĂŽmes dĂ©biles » ⊠Ou des monstres ? Baudelaire nâest pas dupe le corps des vieilles femmes nâest pas harmonieux, elles ont une apparence monstrueuse ce sont des monstres disloquĂ©s » v5, brisĂ©s, bossus ou tordus » tout cassĂ©s » et mĂȘme discords » Le poĂšte ne rechigne pas Ă admettre leur laideur au contraire, il la met en avant. Il peint des crĂ©atures pathĂ©tiques et souffrantes. Elles sont proches de la terre, rampent » se traĂźnent » et sont donc plus proches de la boue que des cieux. De la tendresse pour les petites vieilles Les petites vieilles sont des ĂȘtres rejetĂ©s de la sociĂ©tĂ©, que chacun mĂ©prise ou tout du moins regarde avec pitiĂ© ; ce sont des parias, autrefois membre de cette mĂȘme sociĂ©tĂ©. Elles sont difformes et plus personne ne prendrait de plaisir Ă les regarder. Pourtant, il existe encore une figure qui les contemple et encense leurs traits câest le poĂšte. Pas nâimporte lequel celui qui a Ă©crit LâAlbatros », poĂšme qui dĂ©crit le poĂšte comme un ĂȘtre rejetĂ© par tous. Baudelaire nâĂ©tait en effet pas une personne des plus sociables, et il Ă©tait lui-mĂȘme considĂ©rĂ© comme laid. Il semble alors assez Ă©vident de faire le parallĂšle entre lui et les petites vieilles quâil dĂ©crit et pour qui il ressent de la tendresse. Une description froide de crĂ©atures indĂ©terminĂ©es Le ton du poĂšme paraĂźt trĂšs dĂ©tachĂ© au premier abord. Baudelaire fait comme une description des petites vieilles » Ă la maniĂšre dâun scientifique il les regarde, les observe, les dĂ©crit avec des termes crus, terre-Ă -terre. Il les guette » ces crĂ©atures qui rampent » trottent » se traĂźnent », Il Ă©tudie leur comportement et se dĂ©crit lui-mĂȘme comme une sorte de scientifique, mĂ©ditant sur la gĂ©omĂ©trie » Le ton de ces vers sont encore plus froids et cyniques lorsque lâon voit quâil portait une rĂ©flexion sur la mort prochaine des petites vieilles il Ă©tablit un parallĂšle entre lui-mĂȘme et un gĂ©omĂštre afin dâillustrer la façon dont il considĂšre la forme et la taille du cercueil qui sera offert aux petites vieilles. De fait, le poĂšte sâinterroge Ă propos de ces ĂȘtres pendant quâil les observe. Elles lui semblent ambivalentes, pleines de contradictions. De nombreuses antithĂšses les illustrent. Au vers 6, Baudelaire les compare Ă Eponine ou LaĂŻs » Eponine est une femme qui reprĂ©sente la vertu, et LaĂŻs reprĂ©sente le vice ; elles symbolisent Ă la fois le bien et le mal. Cela traduit le caractĂšre ambivalent de la femme, ce que Baudelaire illustre souvent dans ses poĂšmes. Il oppose aussi lâintĂ©rioritĂ© Ă lâextĂ©rioritĂ© de ces petites vieilles. A lâintĂ©rieur dâun corps disloquĂ©, difforme, monstrueux, se trouve une Ăąme » que lâon peut distinguer Ă travers des yeux divins de la petite fille » des yeux mystĂ©rieux » On le sait, les yeux sont le miroir de lâĂąme » ils expriment sans mots ce qui se cache en profondeur. GrĂące aux yeux de celles qui furent des femmes, en apparence laides et vieilles dĂ©sormais, on peut voir les restes dâune Ăąme dâenfant, prisonnier dâun corps monstrueux. Une description faussement froide Il invite en fait Ă la tendresse envers ces crĂ©atures malgrĂ© leur apparence. Une autre opposition est encore prĂ©sente dans le poĂšme, qui cette fois discorde avec le ton froid du scientifique le poĂšte balance entre la rĂ©pulsion, comme on a pu le voir prĂ©cĂ©demment avec les corps disloquĂ©s » et autres adjectifs, et la fascination. Les substantifs et adjectifs sont nombreux enchantements » charmants » ⊠Les petites vieilles ne sont pas que des fantĂŽmes du passĂ©, ce sont une source dâinspiration et de fascination pour le poĂšte. Il voit en elles quelque chose qui inspire sa pitiĂ© en mĂȘme temps quâil a un sentiment de dĂ©goĂ»t, puisquâil arrive Ă voir au-delĂ de la carapace de leur corps. De fait, le ton nâest que superficiellement cruel, car on ressent lâindĂ©niable pitiĂ© ou charitĂ© du poĂšte face Ă ces crĂ©atures aimons-les » divins » ⊠Par ailleurs, il semble ressentir une vĂ©ritable sympathie au sens Ă©tymologique capacitĂ© Ă partager les mĂȘmes sentiments, les mĂȘmes Ă©motions face Ă ces vieilles qui paraissent ĂȘtre le miroir du spleen que ressent Baudelaire, ce qui nous amĂšne vers notre derniĂšre partie de cette analyse. Le prĂ©texte poĂ©tique rendre un corps laid en un sujet noble Les petites vieilles, incarnations de Paris Paris est le parfait lieu pour dĂ©crire la laideur, le sale Ă cette Ă©poque, la ville sent mauvais, hĂ©berge de nombreuses maladies, nâest pas encore rĂ©novĂ©e par Haussmann, etc. Il ne faut pas creuser trĂšs loin pour observer la comparaison entre les petites vieilles et la ville de Paris. Dâabord, la rencontre entre le poĂšte et les petites vieilles se fait dans la ville, espace problĂ©matique, entre laideur et envoĂ»tement Dans les plis sinueux des vieilles capitales, / OĂč tout, mĂȘme lâhorreur, tourne aux enchantements » et 2. Baudelaire la dĂ©crit Ă lâaide dâhyperboles antithĂ©tiques, entre horreur » et enchantements ». Aux enchantements peut aussi se raccorder le domaine du rĂȘve, quâon peut voir avec les plis sinueux », qui se rapportent Ă une ville labyrinthique, ou bien aux rides des petites vieilles. Autour du poĂšte, lâespace devient de plus en plus complexe Ă mesure des descriptions. La rĂ©alitĂ© est prĂ©sente avec la laideur, la multitude de la foule, les bruits urbains tels que ceux des omnibus. Mais lâimaginaire tend toujours Ă se battre pour gagner du terrain le labyrinthe, les spectres des petites vieilles, ⊠La rĂ©alitĂ© urbaine est ainsi transformĂ©e en terrain de jeu de lâimagination du poĂšte, ce qui rĂ©vĂšle son intĂ©rioritĂ© ainsi que son projet poĂ©tique. La beautĂ© dans la laideur De fait, le poĂšme illustre parfaitement le projet ainsi que lâintĂ©rioritĂ© de Baudelaire dans lâĂ©pilogue des Fleurs du Mal, il Ă©crit Tu mâas donnĂ© ta boue et jâen ai fait de lâor ». Le but est de rĂ©inventer la beautĂ©, de ne plus se concentrer sur le Beau classique. Le laid, le difforme, le sale sont de nouvelles formes de beautĂ©. Le paysage urbain a ainsi Ă©tĂ© rĂ©habilitĂ© par le poĂšte. Imaginez Paris en 1857 vieille, sale, pauvre, grouillant de monde. Les poĂštes romantiques surtout, ceux de la gĂ©nĂ©ration avant Baudelaire, nâaimaient que les paysages naturels et grandioses. Baudelaire rĂ©habilite la beautĂ© dans la laideur, et les petites vieilles sont une incarnation de Paris personne ne les trouve belles, elles sont des monstres disloquĂ©s » dĂ©crĂ©pits » Ce poĂšme reflĂšte la pensĂ©e et lâesthĂ©tique de la laideur de Baudelaire le laid et le mal sont des sujets poĂ©tiques dâoĂč peut venir la beautĂ© Le Beau est toujours bizarre ». Dans la ville, lâhorreur » du lieu tourne aux enchantements » ; et les petites vieilles sont Ă la fois des crĂ©atures dĂ©crĂ©pits » et charmants ». Pour Baudelaire, ces mots ne sont pas des antithĂšses ils peuvent aller ensemble sans se contredire. LĂ est toute la modernitĂ© de la pensĂ©e de Baudelaire la laideur est son objet poĂ©tique phare. Urbanisme, laideur et modernitĂ© Toute cette esthĂ©tique de la laideur est trĂšs nouvelle pour lâĂ©poque, et cette volontĂ© tĂ©moigne de la modernitĂ© de Baudelaire quant Ă sa vision du beau. Pour lui, la dĂ©finition de la modernitĂ© se tient en ces quelques mots La modernitĂ©, câest le transitoire, le fugitif, le contingent, la moitiĂ© de lâart, dont lâautre moitiĂ© est lâĂ©ternel et lâimmuable. » On retrouve dans cette dĂ©finition les petites vieilles ce sont des ĂȘtres qui vont bientĂŽt mourir, qui ne sont lĂ que temporairement. Au travers de leur description, Baudelaire parvient Ă tirer lâĂ©ternel du transitoire ». Les petites vieilles sont Ă la fois dans le passĂ© et dans le prĂ©sent elles sont des vestiges du passĂ© se mouvant dans un paysage urbain bien actuel ; de simples passantes que le poĂšte dĂ©crit fugitivement dans son poĂšme. Le poĂšte nâidĂ©alise pas le rĂ©el comme la plupart encore de ses contemporains ou des romantiques il fait osciller son poĂšme entre prosaĂŻsme et onirisme. La beautĂ© nâest pourtant pas totalement absente, elle est transformĂ©e câest une poĂ©sie urbaine. Ainsi, Baudelaire se fait mĂ©moire du prĂ©sent », quand lâart classique considĂ©rait jusque lĂ faire une poĂ©sie de lâimmuable uniquement. Conclusion de lâanalyse Les Petites Veilles En conclusion, ce poĂšme a tout pour se distinguer du XVIe siĂšcle, et de la vision de la beautĂ© de Ronsard. Alors que ce dernier ne voit de la beautĂ© quâen une jeune femme, aux traits physiques apparemment dignes des canons de beautĂ©, Baudelaire se veut plus subversif encore en crĂ©ant une poĂ©tique de la boue. Il dĂ©crit dans son poĂšme des petites vieilles, parfois Ă la maniĂšre dâun scientifique froid, mais le plus souvent en manifestant toute la tendresse quâil voit en ces ĂȘtres qui lui ressemblent finalement beaucoup. Le poĂšte met en Ćuvre son projet prendre de la boue pour la transformer en or. Baudelaire est celui qui a transformĂ© le paysage urbain apparemment laid et sale en un sujet poĂ©tique beau et fascinant. source
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